On pourrait aussi parler du père, dit l'Ethnologue: Joseph Kennedy. Roosevelt, comme vous le savez, en avait fait son ambassadeur à Londres. Mais en 1940, il le limogea, car ce dernier appartenait au camp dit des "appeasers", hostiles au déclenchement d'une guerre en Europe. Il pensait, à tort bien sûr, qu'une telle guerre n'engendrerait que des catastrophes. C'est ce qu'il expliquait dans ses mémorandums à Washington. Roosevelt pensait de même, mais en tirait d'autres conclusions: non pas qu'il fallait en prévenir le déclenchement mais au contraire tout faire pour le favoriser. Homme de gauche, mais d'orientation impérialiste (ce n'est pas nécessairement incompatible), disciple de l'amiral Mahan, l'un des pères fondateurs de la stratégie planétaire américaine, il voyait dans cette guerre une chance à saisir pour les Etats-Unis, dans leur course, justement, à l'hégémonie. Il limogea donc Kennedy, non sans le menacer d'anéantir sa carrière politique et celle de ses fils s'il lui prenait envie de révéler au grand jour certaines choses destinées à rester secrètes*. On ne parlera bien sûr pas ici de conspiration. Roosevelt ne conspirait pas, il se contentait de violer les lois américaines sur la neutralité, en même temps que de manœuvrer en cachette pour accélérer l'entrée en guerre des Etats-Unis. Si cela s'était su, lui-même n'aurait pas été l'abri d'une procédure de destitution.
* Dirk Bavendamm, Roosevelts Krieg 1937-45, Herbig, 1993, p. 68.