3/22/2014

A mi-chemin

S'il me fallait caractériser le régime politique actuel, dit l'Avocate je dirais qu'il se situe à mi-chemin entre l'ancienne Allemagne de l'Est (la Stasi, effectivement) et l'Espagne franquiste (ce qu'on a appelé le "pluralisme limité"*), en prenant soin toutefois de préciser que ni l'ancienne Allemagne de l'Est, ni l'Espagne franquiste, ne connaissaient encore Internet. Internet est incontestablement un plus dans ce domaine. Cela étant, une question se pose: ces traits ne font-ils que caractériser un régime particulier, le régime ..., ou ne convient-il pas plutôt de dire qu'ils caractérisent le régime occidental en général**? Peut-on sérieusement dire, par exemple, qu'en …, juste à côté, les libertés publiques soient mieux protégées qu'elles ne le sont chez nous, en ...? La liberté de la presse, en particulier? Que, dans le pays en question, les gouvernants résistent mieux que ce n'est le cas en … à la tentation, officiellement condamnée, d'utiliser tous les moyens possibles et imaginables pour espionner et ficher les personnes? Et si tel n'est pas le cas, ce que, personnellement, j'inclinerais très honnêtement à penser, peut-on au moins dire que l'habeas corpus y est encore respecté (alors qu'en ..., comme plusieurs affaires récentes l'ont révélé au grand jour***, il ne l'est plus)? Je n'ai pas de réponse, dit l'Ethnologue. Ce qu'on pourrait peut-être dire, c'est que la ... est en tête de l'évolution générale. Elle a une longueur d'avance. Je te dis ça, mais c'est une simple impression.

* Voir Guy Hermet, "Un régime à pluralisme limité? A propos de la gouvernance démocratique", in Revue française de science politique, février 2004, pp. 159-178. Le rapprochement avec le régime franquiste est suggéré aux pages 174-175. Le concept de "pluralisme limité", avec application à l'Espagne franquiste, est emprunté au politologue Juan Linz (ibid., p. 162).
** Voir "L'après-démocratie", 6 juin 2012.
*** Voir "L'hôpital", 20 février 2014.


3/13/2014

Rien ne se fait

Regarde un peu leurs méthodes, dit le Double. Ils convoquent des candidats à la naturalisation et les font chanter: soit vous collaborez avec nous, vous nous donnez des noms, soit votre dossier est écarté, et vous risquez l'expulsion. C'est vraiment la Stasi. Des noms de qui, dit l'Etudiante? De personnes hostiles au mariage pour tous, dit le Double. Ils veulent les ficher. Permettez, dit le Politologue. La France est un Etat de droit. Toutes les autorisations ont été données. Et alors, dit l'Etudiante? Changeons de sujet, dit le Politologue. Ou à peine. Il est beaucoup question ces temps-ci, comme vous le savez, d'écoutes téléphoniques. Ces choses-là existent, je ne dis pas le contraire. La France est probablement, même, de tous les pays européens, celui où les dirigeants se permettent le plus de choses dans ce domaine**. Plus ou moins tout le monde est sur écoute***. Mais c'est très "encadré"****. On n'écoute pas les gens comme ça, qu'est-ce que vous croyez. Il y a toute une procédure. Vous me direz: mais dans la Stasi aussi il y avait des procédures. Oui, mais très différentes. Voyez aussi l'école, dit l'Activiste: que ne raconte-t-on pas à son sujet. On parle de genre, de lavage de cerveau, de Dieu sait quoi encore. A nouveau, rien ne se fait sans autorisation: "Le processus et le calendrier sont transparents"*****. Aucune contrainte non plus: "Les élèves comprennent très bien - et parfois très vite - ce qu'on attend d'eux (sic)"*****.  Certains évoquent l'ancienne Union soviétique. Qu'est-ce que les gens n'inventent pas.

* Le Figaro, 5 mars 2014.
** Voir "En attente", 15 janvier 2012.
*** Voir p. ex. Le Monde, 21 mars 2014, 22 mars 2014, etc.
**** France Inter, 12 mars 2014, vers 19 h 30.
***** Le Monde, 14 février 2014.



3/04/2014

A l'agonie

Personne, en réalité, ne sait si les services secrets américains veulent ou non la guerre, dit le Colonel. Plus exactement encore, s'ils estiment ou non le moment venu d'en déclencher une. Mais cette question n'est pas très importante. On connaît la formule de Clausewitz: ce n'est jamais l'Etat agresseur qui déclenche une guerre, mais bien celui d'en face, l'Etat sur la défensive (il pourrait ne pas se défendre). Les Américains ne sont donc pas, directement au moins, concernés. Cela étant, ils n'en maintiennent pas moins la pression. "Fuck the EU", dit la sous-secrétaire d'Etat américaine aux affaires européennes, Victoria Nuland*. Les "princes-esclaves"** européens s'activent donc comme ils le peuvent, font le forcing. Mais le zèle même qu'ils mettent à remplir leur devoir d'Etat montre qu'il ne leur pèse pas trop. En France, 50 % des demandeurs d'emploi ne touchent aujourd'hui plus rien: ni indemnités, ni aide sociale***. Les dirigeants se doivent donc de réagir. Quand l'économie est à l'agonie, à plus forte raison encore que le dépôt de bilan se profile à l'horizon, il est temps d'organiser de grandes fêtes, avec campagnes de diabolisation et le reste. A l'Ouest, rien de nouveau.

* Le 6 février 2014.
** Voir "Quelque part", 2 juillet 2013.
*** Réforme, 13 février 2014.