5/11/2014

Une autre

Le Colonel, il y a quelques semaines*, disait que le récent coup de force américain à Kiev pouvait être mis en parallèle avec l'épisode des fusées soviétiques à Cuba en 1962, dit l'Ethnologue. Dans les deux cas, en effet, on touche au "sanctuaire" de l'autre, ce qui, en théorie au moins, ne devrait pas se faire. Tu peux toucher à tout sauf à ça. Soit, par conséquent, les Américains ont perdu la tête, soit, comme beaucoup le pensent, ils veulent vraiment la guerre. C'est réellement ce qu'ils cherchent. Cela étant, la remarque du Colonel m'en inspire une autre. Jusqu'à la chute du mur de Berlin, le totalitarisme était à l'Est, la résistance au totalitarisme à l'Ouest. On pourrait se demander si la situation ne s'est pas aujourd'hui inversée. Le régime russe actuel ne saurait, certes, être qualifié de démocratique, personne ne le prétend. Mais ce n'est pas non plus un régime totalitaire. S'il fallait l'étiqueter, on parlerait de despotisme éclairé: Joseph II, Stolypine, etc. Quant au régime occidental, non seulement, c'est une évidence, il a cessé depuis belle lurette d'être démocratique, mais il s'est lui-même, au fil du temps, progressivement transformé en une espèce particulière, mais authentique, de totalitarisme. Les traits les plus souvent cités sont l'extension illimitée du contrôle social, la montée en puissance des services spéciaux, la militarisation de la police, les incarcérations abusives (souvent accompagnées de sévices, comme on l'a vu l'an dernier en France), les entraves au droit à la liberté d'expression, etc. Ce sont effectivement là des traits totalitaires. Mais il en est d'autres moins souvent cités. Regarde un peu, par exemple, la manière dont on traite aujourd'hui les gens au quotidien, les procédures de travail industrielles, la violence omniprésente, etc. Ce n'est pas nouveau, me diras-tu. Cela a toujours existé. Mais pas comme ça.

* Voir "A l'envers", 3 avril 2014.