8/15/2016

Main-forte

Ah, la Corse, dit l'Ecolière. C'est vraiment particulier, la Corse. Au fait, qu'est-ce qu'elle a de si particulier? D'abord, pour paraphraser Michelet, c'est une île, dit l'Avocate. Qui plus est, relativement petite. Il n'y a pas beaucoup d'espace sur cette île. Quand, en France métropolitaine, l'Autre, avec un grand A, s'empare d'un quartier, d'une ville, voire d'un département entier, pour y instaurer la mixité sociale, théoriquement au moins tu as toujours la possibilité de déménager. Le pays est grand*. Là-bas, en Corse, où veux-tu déménager? Les gens sont le dos au mur, pardon: à la mer. Conséquence, elle est vite tirée. J'ajoute ce qui suit. En Corse, l'Etat lui-même est traditionnellement perçu comme un intrus. Il l'est d'ailleurs, objectivement. A partir de là, quand l'Etat intrus, ne se contentant pas d'être ce qu'il est, Etat intrus, en vient par-dessus le marché à prêter main-forte à l'intrusion d'un nouvel intrus, l'Autre, en l'occurrence, qui plus est avec un grand A, les gens ne sont pas trop surpris. Très vite, ils passent à la case suivante. Je ne dis pas que c'est bien, c'est évidemment très mal. Répète après moi: c'est évidemment très mal. L'Etat n'est pas moins intrusif sur le continent qu'il ne l'est en Corse, dit l'Ecolière. Il l'est même davantage encore. Sauf que les gens, sur le continent, n'en ont pas conscience, dit l'Avocate. Tu vois la différence?

* Cf. Christophe Guilluy, La France périphérique, Flammarion, 2104.