7/19/2007

Je les porte en moi

Comme tu le sais, l'Autorité morale croit aux essences, dit l'Ethnologue. Personnellement je n'irais pas jusqu'à dire que les essences n'existent pas. Si, bien sûr, elles existent, mais autrement que ne l'imagine l'Autorité morale. L'Autorité morale part de l'histoire, plus exactement encore de ce qu'il croit être l'histoire (car ses conceptions historiques sont largement mythiques), alors que, selon moi, il faut partir de la géographie. Je rejoindrais sur ce point Ramuz. Relis Raison d'être, ou encore Aimé Pache, peintre vaudois. Pour Ramuz, ce n'est pas tant l'histoire qui te fait être ce que tu es que la géographie. L'identité est d'abord liée à la nature, au paysage. Je les porte en moi comme eux-mêmes, de leur côté, me porte en eux. Le paysage, en l'occurrence, c'est le lac, avec les vignes de Lavaux en surplomb. Ce "beau lac", comme le dit Rousseau dans les Confessions. Et encore: "Celui autour duquel mon coeur n'a jamais cessé d'errer". Soit, dit l'Avocate. Mais tu connais la phrase de Montaigne: "Le monde n'est qu'une branloire perenne. Toutes choses y branlent sans cesse: la terre, les rochers, du Caucase, les pyramides d'Egypte", etc. Il y a vingt mille ans, le lac n'existait pas. A la place, il y avait un glacier, il descendait même jusqu'à Lyon. Je ne m'occupe pas de ce qui se passait il y a vingt mille ans, dit l'Ethnologue. Il y a deux mille ans, le lac était déjà là. Personnellement, ça me suffit.