C'est passé complètement inaperçu, dit le Cuisinier: ils viennent de supprimer la dernière cabine téléphonique. Oui, la dernière. Ils auraient pu en maintenir quelques-unes au moins en fonction: dans les gares et les aéroports, par exemple. Ou encore les hôpitaux. Quelques-unes. Leur suppression, à ces endroits-là, va créer de réels problèmes. Qu'est-ce que tu crois. Ils les ont toutes supprimées: toutes et sans exception. Et donc, soit tu disposes d'un téléphone portable, soit tu ne téléphones pas. C'est aussi un signe. Nous voici revenus au temps des messagers, dit l'Ecolière. Un nouveau créneau pour Uber, peut-être. Vous avez vu le dernier film de Ken Loach? C'est bien sûr un geste politique, dit l'Avocate. D'une extrême violence, mais politique. Il faut l'interpréter ainsi. Pendant que les communicants officiels amusent la galerie avec la crise climatique, l'Etat total, lui, continue d'avancer ses pions. Tranquillement, mais il les avance. Un certain nombre de personnes se refusent, à l'heure actuelle encore, à avoir un portable. Elles restent ainsi non-traçables. Pour l'Etat total, c'est inacceptable. Il ne peut pas exactement encore te contraindre à avoir un portable. Mais il accroit la pression. Il faut retourner le problème, dit le Colonel. Imaginez, je ne sais pas, moi, par exemple une panne de courant, leurs liaisons réseaux qui s'arrêtent subitement: crise climatique ou non, c'est une chose qui pourrait très bien un jour se produire. Ils feront alors comment pour tracer les gens?