9/30/2025

Evidence

Beaucoup pensent que ce scrutin a été truqué, dit l'Ecolière. Pour moi c'est une évidence. Mais comment le prouver? Ce sont des professionnels, dit l'Avocate. Tu ne pourras donc jamais le prouver. Mais comme tu le dis très bien, c'est une évidence. Tu peux donc très bien aussi te passer de preuves. L'évidence ne prouve rien, mais elle te dit la réalité. Toutes sortes de gens continuent à croire qu'on est en démocratie, dit l'Ecolière. Toutes sortes de gens aussi s'aveuglent eux-mêmes, dit l'Avocate. Quand on est habitué à voir le monde d'une certaine manière, on continue à le voir comme, justement, on a pris l'habitude de le voir - alors même qu'il s'est complètement transformé. Mais tu ne t'en rends pas compte. Tu crois voir certaines choses, mais c'est ton cerveau, en fait, qui les voit, parce qu'avec le temps elles s'y sont imprimées: par exemple, qu'on est en démocratie. D'autres, en revanche, tu ne les vois pas: ce dont il vient d'être question par exemple. La plupart des gens fonctionnent ainsi. L'évidence est celle que tu dis. C'est ce que tes yeux te donnent à voir. Mais beaucoup de gens ne voient pas ce que leurs yeux leur donnent à voir. Ils ont désappris à le faire.

9/27/2025

Plaisir naturel

Tiens, dit l'Ecolière, il en prend pour cinq ans. C'est beaucoup, cinq ans. Comment l'interpréter? Comme toujours, il y a plusieurs explications, dit l'Avocate. Première, les juges règlent ainsi leurs comptes. Quand il était au pouvoir, il avait dit beaucoup de mal des juges et de la justice. A tort, bien sûr. "Goût de la vengeance. Plaisir naturel de la démolition" (Baudelaire, Mon coeur mis à nu, § 5). Tout le monde défend sa corporation. Deuxième, tu te souviens peut-être de l'affaire ..., il y a quelques années. Lui, on lui reprochait ses déclarations sur l'Ukraine. Au procès, ils n'ont bien sûr jamais évoqué l'Ukraine. Autre chose, tu trouves toujours. On ne saurait exclure qu'il n'en aille ici de même. Troisième, c'est une tendance générale. Quand tu perds aujourd'hui une élection, tu as de bonnes chances, ensuite, de te retrouver derrière les barreaux. Chacun sait que si Trump avait perdu l'élection de 2024, il allait tout droit en prison - et, lui, pour de très longues années. Heureusement pour lui il ne l'a pas perdue. En revanche, ceux qui l'ont perdue se retrouvent eux-mêmes, maintenant, en difficulté. Voilà, je t'explique. Pour le reste, rien ne t'empêche de dire que nous sommes dans un Etat de droit. Tout dépend de ce que tu entends par là. Chacun est libre de ses définitions.

8/11/2025

Prévision

Les droits de douane de Trump s'éclairent si on les resitue dans le temps long, dit le Visiteur. Il y a plusieurs décennies déjà, Paul Virilio écrivait: "La guerre économique déclarée par les Etats-Unis à l'Europe n'est pas une simple péripétie de la libre concurrence, c'est le commencement d'une oppression qui ne s'achèvera qu'avec le sous-développement des Etats européens" (L'insécurité du territoire, Galilée, 1993, p. 158). Comme on le voit, cette prévision est en voie de réalisation. Les droits de douane de Trump viennent ici s'ajouter aux conséquences de la guerre en Ukraine pour l'économie européenne. L'élargissement à l'Est de l'OTAN a aussi été pensé et décidé pour ça. D'une manière générale, on devrait s'habituer à considérer que toutes les guerres américaines sont entre autres et en particulier dirigées contre l'Europe. Paul Virilio précise en outre: "L'intérêt que la plupart d'entre nous portons aux pays opprimés d'Amérique latine devrait orienter la vision politique, car l'exploitation outrancière des Etats sud-américains avec la complicité passive ou active des forces armées indigènes n'est en fait qu'une préfiguration de ce que devrait devenir l'Europe de la fin de ce siècle". Cela a peut-être pris un peu plus de temps que prévu, mais nous y sommes. Les similitudes ne manquent pas par ailleurs entre les gouvernants européens actuels et leurs homologues sud-américains d'il y a quarante ou cinquante ans. Paul Virilio parle de "complicité passive ou active": l'expression ne s'applique pas moins aux premiers qu'aux seconds.

7/25/2025

Evolutif

Tu opposes le rêve à la réalité, dit l'Ethnologue: sauf que l'instinct de survie ne relève pas du rêve, il relève de la réalité. Pour l'instant encore, les gens se laissent faire, mais il n'en ira pas nécessairement toujours ainsi. Il faut être attentif aux effets de seuil. Aujourd'hui ils pensent : je prends moins de risques en ne résistant pas à la violence des bandes armées qu'en lui résistant, car si je lui résistais je subirais une autre violence encore : celle des autorités elles-mêmes, qui me feraient payer cher le fait d'avoir ainsi enfreint leur interdiction de "blesser ou tuer (mes agresseurs)". Concrètement je risque de me retrouver pour un long bout de temps derrière les barreaux. C'est un calcul d'intérêt. De leur côté, les bandes armées ont tendance à repousser toujours plus loin les limites de ce qu'elles s'imaginent pouvoir faire sans trop de risques pour elles: car, justement, elles savent que leurs victimes ont interdiction de recourir à l'autodéfense. C'est aussi un calcul d'intérêt. On peut estimer que cet état de choses est stable. Il ne l'est évidemment pas. Il est évolutif. A un moment donné, les gens préféreront ne pas se laisser faire. Exactement quand? Toute la question est là. A quel moment les gens se diront-ils: ce que les bandes armées me font subir, je ne le supporte plus. Je l'ai supporté jusqu'îci, mais désormais trop c'est trop. A partir de maintenant je leur résiste. Je résiste à ces bandes que protègent et à vrai dire encouragent les autorités, et je pourrais même, le cas échéant, résister aux autorités elles-mêmes. Etc. A quel moment? On reviendra une prochaine fois sur le sujet.

7/20/2025

Métaphore

Il faudrait ici relire le Prince, dit le Visiteur. Il est paradoxal en ce contexte de faire appel à Machiavel, mais comme tu le sais il existe plusieurs utilisations possibles de Machiavel. Je me réfère en particulier au chapitre consacré à la virtù. La virtù est chez Machiavel ce qui intervient pour rééquilibrer la fortune, qui autrement régnerait sans partage. La fortune désigne le hasard, mais par extension aussi, pourrait-on dire, l'ensemble des situations réputées sans issue. L'image ici qui s'impose est celle de l'encerclement. Faire preuve de virtù, c'est briser l'encerclement. Il faut parfois l'entendre au sens propre, en quel cas briser l'encerclement signifie foncer dans le tas, comme on le voit dans le roman de Barbey d'Aurevilly, Le Chevalier des Touches, qui contient plusieurs scènes de ce genre. En fonçant dans le tas, tu romps l'encerclement. Autrement, c'est une métaphore. Dans le cas qui nous occupe, le cercle existe bel et bien, sauf que la démarche n'est pas ici centrifuge mais centripète. Mais le problème est le même. Le cercle a l'air bien fermé et verrouillé, et dans une certaine mesure il l'est, mais il te faut partir du principe qu'il ne l'est pas. Et s'il l'est quand même, tu t'arranges pour le déverrouiller. Tu l'enfonces, ou le troues. C'est en cela même que consiste la virtù. Ce sont des choses que tu découvres en les faisant. La pratique, en ce sens, précède la théorie. Mais on pourrait aussi dire l'inverse : la théorie devient elle-même une pratique. On avait déjà abordé le sujet il y a quelques semaines. A ta guise.

7/14/2025

Sans résistance

Jusqu'ici ils ne faisaient que piller les magasins, dit le Double. Les domiciles privés étaient en revanche épargnés. Sauf, justement, que c'est en train de changer. Je fais bien sûr ici référence au home-jacking: ces visites domiciliaires accompagnées de violences, qui font désormais partie du quotidien. Voici les conseils des autorités: "Il est conseillé de coopérer sans résistance, de ne pas chercher à dissimuler ses biens ni à fuir ni à crier". C'est dans le Gratuit du 9 juillet dernier, p. 4. Les autorités se font par ailleurs menaçantes: si la victime blesse ou tue son agresseur elle est passible de poursuites pénales. Etc. En soi ce n'est pas nouveau, dit l'Auditrice. On en a souvent parlé ici même. Les autorités ont depuis longtemps choisi leur camp. Personnellement, je n'ai rien contre les petits chéris. Mais ils méritent bien leur nom. Tu auras relevé cette phrase, dit le Double: "Il est conseillé de coopérer sans résistance". On se croirait en 1940. Justement, dit l'Avocate. Les gens vont peut-être commencer à s'organiser. Bien sûr je rêve. Mais il n'est pas interdit de rêver.

6/19/2025

La Perse

Un peu d'histoire, dit l'Auteur. Dans un de ses livres paru en 1949, Terre inhumaine, le peintre et écrivain polonais Joseph Czapski raconte le long exode, en 1942-43, des Polonais rescapés du massacre de Katyn, qui cheminèrent des mois durant du Turkestan à la Méditerranée orientale, en passant notamment  par l'Iran. Daniel Halévy, le préfacier, résume ainsi les pages que Czapski consacre à ce dernier pays: "La Terre promise, ici, c'était la Perse, Téhéran, Meched, Chiraz au loin. (...) Et la première impression que Czapski et ses compagnons en reçoivent, le premier visage qui leur soit montré par le peuple qui les reçoit, c'est celui de la charité." Halévy ajoute: "Harrassés, affamés, les voici secourus en même temps que reçus" (Joseph Czapski, Terre inhumaine, réédition L'Age d'Homme, 1978, Préface de Daniel Halévy, p. 10). Pourquoi ces citations, dit le Collégien? On parle beaucoup ces semaines-ci, comme tu le sais, de l'Iran, dit l'Auteur. Certains ne rêvent que d'une chose: lui appliquer le même traitement qu'à la Serbie en 1999 ou à l'Irak en 2003. Si possible le rayer de la carte, en faire une terre brûlée, etc. Ils diront ensuite qu'ils défendent le droit international. Il est donc bon de rappeler ici ces choses.
 

6/17/2025

Faire quelque chose

Tu n'as pas encore parlé du tyrannicide, dit l'Ecolière. Platon, sauf erreur, en parle dans la République (Livre IX), et Aristote dans la Politique (Livre V). Je ne suis ni Platon, ni Aristote, dit le Visiteur. On peut en parler sans être ni Platon ni Aristote, dit l'Ecolière. Soit, dit le Visiteur, mais si j'en parlais, je devrais commencer par attirer ton attention sur les difficultés auxquelles on se heurte en orientant ses pas dans cette direction. Tu connais la phrase de Zinoviev, dit l'Ecolière: "Il faut risquer et faire quelque chose sans écouter les calculs théoriques" (Les hauteurs béantes, p. 470). Beaucoup de choses dans la vie ne s'expliquent pas théoriquement. Elles vont même contre la théorie. Certes, dit le Visiteur. Mais Zinoviev ne dit pas que les calculs théoriques ne servent à rien. Il dit juste que ce sont deux démarches différentes. Au fond, si je te comprends bien, tu préfères te situer au plan pratique que théorique, dit l'Ecolière. Peut-être, dit le Visiteur - mais cette préférence même a un fondement théorique.

6/14/2025

Avant-hier

C'était quelqu'un de très remarquable, dit le Double. Il a écrit plusieurs ouvrages sur les questions de défense et de renseignement. Sauf qu'avant-hier, son corps a été retrouvé sans vie dans une rue de ... Officiellement, il se serait suicidé. Ces choses-là ont toujours existé, dit le Visiteur. Mais c'est vrai que depuis un certain nombre d'années, elles ont tendance à se banaliser. Autrefois, quand tu t'écartais du droit chemin, tu savais que tu te créais des problèmes : arrestation au petit matin, garde à vue prolongée, contrôle fiscal sur plusieurs semaines, etc. Tout cela, bien sûr, reste très actuel. Mais en plus, maintenant, tu entres dans la "zone des balles dans la tête", pour citer Joseph Goebbels. La guerre contre le terrorisme a été l'élément accélérateur. Ils ont commencé par cibler des terroristes ou prétendus tels, puis, très vite des non-terroristes - concrètement, de simples opposants: des gens leur ayant manqué de respect ou dit leurs quatre vérités. Cette pratique, l'assassinat ciblé, est aujourd'hui largement arsenalisée. Ils ne le crient assurément par sur les toits. Mais c'est une réalité. Parmi les victimes, des militaires et des membres des services spéciaux, mais pas seulement. Lui, par exemple, appartenait au monde de la recherche. Tout cela, naturellement, doit être contextualisé. On parlait à l'instant de Joseph Goebbels. C'est un personnage historique, mais (au regard de ce qui se passe à l'heure présente danss certains pays) également métonymique.

5/27/2025

Par élimination

Et pour la réponse, dit le Nourisson? Procédons par élimination, dit l'Ethnologue. Les élections? Je ne t'apprendrai rien en te disant qu'elles sont biaisées, ne serait-ce qu'en raison de l'inégalité d'accès aux médias officiels. Et probablement aussi truquées. Ils n'hésitent pas par ailleurs à les annuler, comme on vient de le voir en Roumanie. Ou encore, comme en France, à te déclarer inéligible. L'insurrection ? Au XIXe siècle déjà, Engels disait qu'elle n'était plus le sujet. Cela n'a pas plus de sens aujourd'hui d'entrer en confontation avec l'Etat - au moins en confrontation directe. Il est beaucoup trop fort. Souviens-toi de l'épisode des Gilets jaunes. Non, tu ne te souviens pas, tu n'étais pas né. Mais je te dis quand même. Allons plus loin. Tu as parfois des gens qui s'organisent, et surtout en parlent sur Internet. On les laisse s'organiser un petit moment, puis survient la Dégéèci : perquisition, incarcération, dissolution. A l'évidence, ce n'est pas non plus une très bonne idée. Je sens maintenant que tu vas me dire: il n'y a plus qu'à tirer l'échelle. Retirons-nous dans notre citadelle intérieure. On peut très bien le faire, et beaucoup le font. Mais ce serait dommage. J'irais même plus loin encore: ce serait une faute éthique. Au demeurant toutes les possibilités ne sont pas encore épuisées.

5/18/2025

Par parenthèse

Tu connais le mot de Kissinger, dit le Nourrisson : "Il est dangereux d'être l'ennemi des Etats-Unis, mais il est fatal d'être leur allié". Eux-mêmes, d'ailleurs, viennent de nous déclarer la guerre. Qu'attend-on donc pour renverser les alliances ? Le problème est toujours le même, dit l'Ethnologue: tous ont un dossier à la NSA. Ils ne sont dès lors pas tellement préparés à faire ce que tu voudrais qu'ils fassent. Ils ne tiennent pas à finir leur vie derrière les barreaux. Nombre d'entre eux sont par ailleurs des agents patentés - si tu vois ce que je veux dire. Pour l'heure, ils sont plutôt dans la surenchère, la fuite en avant. Concrètement, ils poussent à la guerre. Il ne se passe pas de jour sans qu'ils n'inventent une nouvelle provocation. Par parenthèse, les Américains ne seraient pas contre. L'Europe serait ainsi rayée de la carte. Je transforme ma question, dit le Nourrisson. Qu'attend-on pour se débarrasser de ces fous dangereux et incompétents, qui plus est archi-corrompus, en fait authentiquement criminels ? Je ne pense pas seulement à la guerre qui vient, même si c'est aujourd'hui le plus préoccupant - mais à tout le reste. Je répète: qu'attend-on? C'est une bonne question, dit l'Ethnologue.

5/09/2025

Valeurs

Ils parlent de leurs "valeurs", dit le Nourrisson. A part les valeurs LGBT+, je vois mal, à vrai dire, quelles pourraient être leurs "valeurs". La démocratie? La démocratie comme rideau de fumée, oui peut-être - difficilement, en revanche, comme réalité. Ou alors les mots n'ont plus de sens. Ne me dites quand même pas que la ... est une démocratie. Ou la Roumanie, où le gouvernement annule les élections lorsque le résultat ne lui convient pas. L'Etat de droit? Là aussi, il faudrait savoir de quoi l'on parle. Le droit international alors? Demandez un peu aux Serbes, aux Irakiens, ou aux Palestiniens ce qu'ils pensent de la manière dont les démocrates occidentaux respectent le droit international. Au nombre des valeurs que défendent les démocrates occidentaux, on ne manquera pas par ailleurs de compter leur propre intégrité morale, le soin tout particulier qu'ils mettent à ne pas se laisser corrompre ou acheter. On l'a vérifié tout récemment encore pendant la période du ... Résumons-nous donc. Voilà une guerre qui a déjà fait plus d'un million de morts, plusieurs millions de blessés, autant de personnes déplacées, qui a détruit un pays tout entier, est en train de ruiner notre propre économie - sans même parler du risque d'escalade nucléaire. Des gens disent : il serait peut-être temps de l'arrêter, ne croyez vous pas? Sauf qu'on leur répond: vous n'y pensez pas, il y va de nos "valeurs". Encore une fois, quelles valeurs? Tu as toi-même donné la réponse, dit l'Avocate. Ce sont les seules auxquelles ils croient. Ils ne font bien sûr pas la guerre seulement pour ça. Mais entre autres. Et les gens acceptent, dit le Nourrisson? Les gens ont peur, dit l'Avocate.

3/31/2025

Peur civile

Depuis une semaine, la justice occupe seule le devant de la scène, dit l'Auditrice: un tel est mis en examen, tel autre condamné pour harcèlement, un troisième déclaré inéligible, etc. C'est une campagne de peur civile, dit l'Ethnologue. De temps à autre ils en déclenchent une. Accessoirement, l'Etat total en profite pour régler ses comptes. Par exemple, dit l'Ecolière? Prends cet acteur reconnu, dit l'Ethnologue. Il y a quelques années, il était allé faire un petit tour en Russie. Le président Poutine lui avait accordé un passeport russe. Ils lui ont donc fait un procès: pas pour ça, bien sûr, mais pour autre chose. Autre chose, tu trouves toujours. Un cas très semblable est celui de l'ex-Premier ministre Fillon. Tu sais ce qui lui est arrivé. Quelques années plus tôt, il avait fait des déclarations non-conformes en matière de politique étrangère. On lui a présenté l'addition. Et Sarko, dit l'Ecolière? Lui, on lui fait payer ce qu'il disait des juges et de la justice à l'époque où il était président, dit l'Ethnologue. C'était assez bien vu (quoique très en-dessous encore de la réalité). La vengeance est un plat qui se mange froid. Il y a aussi cette décision d'inéligibilité, dit l'Auditrice. Du jamais vu à ce jour. En France non, dit l'Ethnologue. Mais regarde ce qui vient de se passer en Turquie: le président sortant faisant embastiller son principal opposant, le maire d'Istamboul. Ou encore en Roumanie: là, carrément, ils ont annulé les élections. Dans les trois cas, juges et procureurs ont fait montre d'une grande sensitivité. La justice est indépendante, dit la Poire. Laissons-la faire son travail.

3/28/2025

Approprié

On fait souvent la comparaison avec la guerre de 14, dit le Visiteur. En réalité, les deux situations sont très différentes. En 14, un processus autonome s'était mis en route, il est allé jusqu'au bout de lui-même. Les gens ont été pris dans un engrenage. Ici c'est différent. Quand on parle d'engrenage, on veut dire par là que les gens subissent une situation qu'eux-mêmes, peut-être, ont contribué au début à créer, mais qui ensuite leur a échappé. Ils ne voulaient pas aller aussi loin, ou alors pas au même endroit, etc. C'est ce qui est arrivé en 14. On est ici dans autre chose. Il y a clairement aujourd'hui des gens qui veulent la guerre. Certains, au demeurant, ne s'en cachent même pas. Le terme approprié n'est donc pas celui d'engrenage mais plutôt de complot. Oui, je sais, on est très coupable aujourd'hui quand on parle de complot. Les complots n'existent pas, il n'y a que des complotistes. Et pourtant c'est bien le mot qui s'impose: complot contre la paix, en l'occurrence. Dois-je ici le rappeler, c'est une incrimination possible en droit international. Ces gens sont fous, dit le Double. Ils seraient déclarés irresponsables. Là vous vous trompez, dit le Visiteur. Ils ne sont pas fous du tout. Ils voient dans la guerre une solution à leurs problèmes. En un certain sens, ils n'ont pas tort. N'oubliez pas par ailleurs cette autre guerre qu'ils mènent contre leurs propres populations. L'ennemi extérieur leur permet d'accroître encore la pression. Et s'il y a ascension aux extrêmes, dit le Double? Encore mieux, dit le Visiteur.

3/20/2025

Pulsion de mort

Le problème, avec l'épargne, c'est que quand on la confisque, on ne peut pas ensuite répéter l'opération, dit l'Ecolière. On peut la confisquer une fois, mais pas deux. Effectivement, c'est un problème, dit le Visiteur. En revanche, on peut supprimer le problème. Comment cela, dit l'Ecolière? Par la guerre, dit le Visiteur. Grâce à la guerre, on supprime tous les problèmes, celui-là en particulier. Lorsqu'une guerre éclate, l'endettement n'a plus tellement d'importance. D'après toi, c'est ce qui va se passer, dit l'Ecolière? Je ne sais pas ce qui va se passer, dit le Visiteur. Mais à l'évidence, ils veulent la guerre. Ils vont donc peut-être en déclencher une. Sauf qu'ils n'ont pas les moyens de la faire, dit l'Ecolière. Leurs arsenaux sont vides et en plus ils manquent de soldats. Ils manquent de tout, en fait. On peut très bien déclencher une guerre sans avoir les moyens de la faire, dit le Visiteur. C'est même la règle. S'il fallait attendre que les gens aient les moyens de faire la guerre pour qu'ils la déclenchent, il n'y aurait jamais de guerre. C'est en lien avec la pulsion de mort, dit l'Ecolière? Ils veulent supprimer tous les problèmes, dit le Visiteur. A partir de là, tu ne te demandes pas si tu as ou non les moyens de faire ceci ou cela. Tu le fais, c'est tout. Oui, bien sûr. Ce ne sont pas seulement des cyniques, mais des suicidaires.

3/10/2025

Avoirs

Les avoirs russes ne sont qu'une première étape, dit le Double. Mais ils ouvrent la voie. C'est un test de faisabilité, si vous voulez. Reste à savoir s'ils oseront sauter le pas. Assurément, s'ils le font, ils prennent des risques. Non seulement ils violent le droit international (en fait le droit tout court), mais ils montrent qu'on ne peut pas leur faire confiance. En matière économique et financière, c'est rédhibitoire. D'un autre côté aussi ils n'ont pas le choix. Surendettés comme ils le sont, ils doivent impérativement trouver de nouvelles ressources. Et donc, me semble-t-il, ils le feront. Ensuite ils s'attaqueront à l'épargne privée, qui est leur véritable objectif. En saisissant les avoirs russes, ils créent un précédent. Il leur sera plus facile ensuite de confisquer l'argent des particuliers. Cela n'ira probablement pas sans résistance. Mais ils pourront toujours dire: voyez, on vient de le faire avec les Russes. Il n'y a donc pas de raison pour que nous ne le fassions pas avec vous aussi. Dans le même contexte, on pourrait mentionner l'article 47 de la loi de programmation militaire 2024-2030, qui leur permet de réquisitionner les personnes et les biens "en cas de menace prévisible". Si vous ne déférez pas auxdites réquisitions, vous encourez cinq ans de prison et surtout 500 000 euros d'amende. C'est aussi une voie possible. D'une manière générale, il n'y a plus aucune limite. Si, il y en a une, dit le Visiteur: la réalité. Ils vont très vite en prendre la mesure.

2/28/2025

Dépeçage

Il ne faut pas dire que Trump est différent de ses prédecesseurs, dit l'Ethnologue. Il est juste, peut-être, un peu plus lucide. Il a compris que cette guerre était perdue, et donc il abandonne la partie. Les Américains voulaient dépecer la Russie: ils se rendent maintenant compte que c'est plus facile à dire qu'à faire. Et en tirent donc les conséquences. Toute choses égales d'ailleurs, c'est ce qu'ils ont souvent fait déjà dans le passé, tout dernièrement encore en Afghanistan. Quant aux Européens, ils ne peuvent que se louer d'avoir pour dirigeants des êtres d'une telle compétence et intelligence - le monde entier nous les envie. Tout comme leur aptitude légendaire à dire non aux Américains. Ces exécutants sont également réputés pour leur respect de la parole donnée. En 2014, par exemple, lorsqu'ils ont signé les accords de Minsk, ils savaient d'avance qu'ils ne les respecteraient pas. C'est ce qu'eux-mêmes ont reconnu par la suite, allant même, assez naïvement, jusqu'à s'en enorgueillir. Bref, l'Europe se retrouve aujourd'hui isolée et sans alliés. On va voir maintenant ce que ces esprits profonds et subtils, qui plus est d'une grande intégrité, vont bien pouvoir inventer pour sortir de l'impasse où ils se sont eux-mêmes enfermés. Avant toute chose, on l'a bien compris, ils ne veulent pas perdre la face. On les voit ainsi s'agiter pour relancer cette guerre qui a déjà fait plusieurs centaines de milliers de morts. Sauf, heureusement, que l'argent leur fait défaut. A terme, me semble-t-il, on va vers un dépeçage, non pas évidemment de la Russie, vous oubliez, mais de l'Europe elle-même. Les Etats-Unis en prendront une partie (le Groenland dans un premier temps, ensuite sans doute l'Angleterre, qui ne demande que ça), la Russie peut-être une autre (ce qu'elle ne voulait sans doute pas au début, mais on ne voit pas maintenant pourquoi elle se gênerait: ne serait-ce que pour protéger désormais ses frontières), la Turquie une autre encore (les Balkans, une ancienne possession ottomane). Sans oublier l'Algérie, qui a paraît-il des comptes à régler avec la France.

2/15/2025

Le dernier avion

Le plus drôle encore, si l'on ose dire, c'est quand on les voit, comme c'est aujourd'hui le cas, paniquer à l'idée d'avoir à changer de discours sur l'..., dit le Cuisinier. Car c'est bien ce que le nouveau maître américain leur demande, en leur tordant le bras. Soit par conséquent ils s'exécutent, ils changent de discours, au risque de perdre la face, d'achever de se déconsidérer aux yeux de tout le monde, car tout le monde se rendra alors compte que le nom qu'ils portent, celui de prince-esclave, n'est décidément pas usurpé (on l'a toujours su, mais maintenant on en a la preuve), soit ils désobéissent, mais ce sont alors leurs dossiers personnels qui sortent. Car si le maître américain a changé, la NSA, elle, est toujours là. Bref, ils sont pris en tenailles. On ne va pas trop les plaindre. Regardez à quoi ressemble aujourd'hui l'Europe: ce qu'ils ont réussi à en faire en à peine quelques décennies. Encore hier, cette attaque à la voiture-bélier. Etc. Ils n'ont donc que ce qu'ils méritent. On dira même qu'ils s'en tirent à bon compte. Pour l'heure encore, les populations se tiennent tranquilles. Mais à un moment donné, leurs conditions de vie matérielles continuant, comme c'est le cas, à se dégrader (ces personnels archi-compétents et en plus honteusement sous-payés n'y sont naturellement pour rien), elles pourraient très bien se mettre en mouvement. On espère juste pour eux qu'ils réussiront à prendre le dernier avion. Il n'y aura pas de dernier avion, dit le Visiteur.

2/03/2025

Stéréotypes

Comme tu le sais peut-être, la Chèvre a démissionné de ses hautes fonctions, dit le Nourrisson. Oui, je sais dit l'Ecolière. C'est une grande perte pour le pays. Sa rente annuelle à vie s'élève à ... En plus, maintenant, il y a ces fameux avions. On ignore, il est vrai, le montant de la facture: le contrat ne le précise pas. Il comporte bien un chiffre, mais il est évolutif. Je n'invente rien. Et dire qu'il n'y a pas si longtemps encore elle aurait été privée du droit de ..., dit le Nourrisson. Te rends-tu compte un peu? Tant de belles terres ainsi laissées en jachère. C'est là où l'on mesure le poids de certains stéréotypes. A quel point aussi ils peuvent se révéler dévastateurs. Dieu merci, tout cela appartient maintenant au passé. Du passé faisons table rase. Entretemps, le chiffre a encore évolué, dit l'Ecolière. Plus 30 %, je crois. Ou 40, je ne sais plus. Sincèrement, cela me dépasse, dit le Nourrisson. En plus, d'après certains, ce n'est même pas la plus douée. Ne me dis quand même pas que tu es pour le matriarcat, dit l'Ecolière.

1/14/2025

Encore partie

A les entendre, la Russie constituerait une menace pour l'Europe, dit le Visiteur. Le problème, en fait, se pose dans l'autre sens. La Russie n'a pas véritablement de politique européenne. L'Europe lui est indifférente. La Russie résiste aux Américains qui rêvent de la dépecer, c'est une chose. Mais cela ne va pas beaucoup plus loin. Même en matière de contre-information, elle ne se manifeste que très peu. Les chiens aboient, la caravane passe. Personnellement je le regrette. Elle aurait, me semble-t-il, une carte à jouer. Jusqu'à preuve du contraire, la Russie fait encore partie de l'Europe. Sauf qu'en face, il faudrait un interlocuteur, dit le Double. Vous avez lu, bien sûr, le dernier livre d'Emmanuel Todd, La défaite de l'Occident. Il y est notamment question de la NSA, qui possède des dossiers sur à peu près tout le monde en Europe, en particulier sur les élites. Celles-ci se montrent dès lors très obéissantes. Elles font ce qu'on leur dit de faire. Je n'aimerais pas être à la place des actuels princes-esclaves européens, dit le Visiteur. Voyez en quel état, par exemple, se trouve la ... Ou encore l'... Ils paniquent et cherchent à gagner du temps, commme on l'a vu tout récemment encore en ..., quand ils ont annulé les élections. Mais à un moment donné ils se retrouveront le dos au mur. Ce n'est pas pour autant qu'ils se montreront moins obéissants, dit le Double. On s'est mal compris, dit le Visiteur. Ils vont disparaître.

1/08/2025

Capter

Depuis une semaine, je ne peux plus capter la radio suisse (RTS), dit l'Auditrice. Elle a abandonné la FM pour basculer dans le numérique (DAB). Cela signifie que pour pouvoir continuer à la capter, il me faudrait changer de poste récepteur, en acheter un nouveau. Et quoi d'autre encore. On voit bien l'intention cachée, dit l'Etudiante: tenir les gens en haleine, leur pourrir la vie, etc. C'est ainsi que se construit l'Etat total - et bien sûr aussi qu'il fonctionne. Hier, le téléphone, aujourd'hui la radio. Plus leurs "mises à jour" en continu. Etc. Personnellement, je fais comme Bartleby, le héros de la nouvelle éponyme de Melville: je me mets aux abonnés absents. Autant que possible, je cherche à me passer de toutes ces choses. Je suis dans la résistance passive. Je ne les écoutais pas vraiment, dit l'Auditrice: c'était juste un bruit de fond. Mais j'y était habituée. J'aimais bien cette propagande un peu simplette, cela m'amusait de les entendre. Mais 24 heures sur 24, à la longue, on s'en lasse. En plus, ils sont passablement lourdingues, si tu vois ce que je veux dire. Non, tu ne vois pas, c'est pas grave. Par moi-même, je n'aurais rien fait, je suis beaucoup trop paresseuse pour cela. Ils m'ont donc aidée à sauter le pas. Bye-bye la RTS. Je me replierai sur France Culture et France Musique. Eux au moins n'ont pas basculé. Pas encore. Ils le feront, si j'ai bien compris, dans huit ans: en 2033. On a le temps de voir venir. Je vis au jour le jour.