4/20/2024

A 8

C'était hier à Dope-City, dit l'Ecolière. Il a été placé en garde à vue, et de plus son appartement a été perquisitionné. Ils ont débarqué à 8. Au passage, ils lui ont volé son ordinateur. Prenons les choses dans l'ordre, dit l'Avocate. Se faire bien voir des groupes aujourd'hui influents et de leurs courroies de transmission dans l'Etat et les médias, c'est de leur part un soin qu'on peut comprendre. Tous pensent à leur carrière. Tu ne les verras donc jamais prendre la défense du faible contre le fort. Demande-toi ici qui est le faible et qui est le fort. Première remarque. Deuxième, tu me dis qu'ils ont débarqué à 8. On est ici dans la communication. Ce type est inoffensif, et ils le savent. Mais leur intérêt est de faire croire le contraire. Ils espèrent ainsi amortir l'effet du reproche, assurément excessif, qu'on leur adresse parfois d'être sinon exactement de connivence avec les voyous, les dealers de rue et les terroristes, du moins de ne pas trop mal s'entendre avec eux. C'est même le moins qu'on puisse dire. Troisième enfin, ils veulent te faire peur. Quand on les voit débarquer à 8 dans un appartement, encore mieux après avoir cassé la porte, comme c'est de plus en plus désormais la règle, forcément les gens (voisins, témoins, etc.) prennent peur. C'est aussi ça, le but. Si les gens n'avaient pas ainsi peur, leur pseudo-Etat de droit aurait des problèmes. C'est une illustration, une de plus, des dérives de ce régime de plus en plus répressif, violent et corrompu. Il faut beaucoup de courage aujourd'hui pour lui tenir tête. C'est ce que fait cet écrivain, et il en paye le prix.

4/15/2024

A l'hôpital

Autre exemple, dit le Double. Je ne sais pas si tu as vu le documentaire de Daniel Künzli, Totalitarisme helvétique (2023). Non? C'est normal, il n'est pas distribué en salle. Qu'il ne le soit pas est aussi très normal: il traite des violences policières en Suisse pendant la période du Covid. On peut parler de tout en Suisse, mais chacun comprendra en même temps qu'il y a des limites. Et donc les projections ne sont que ponctuelles: tel soir à tel endroit, parfois aussi dans des structures alternatives, etc. Ce n'est pas plus mal. Le film donne donc la parole aux victimes, elles décrivent dans le détail ce qu'elles ont subi concrètement: coups et blessures volontaires, passages à tabac en règle, gaz toxiques, etc. Parfois cela s'est terminé à l'hôpital. Certaines ont déposé plainte: plaintes qui soit ont été classées sans suite, autrement dit la justice ne s'est même pas donné la peine de les instruire, soit ont été rejetées. On voit effectivement mal, dans ces conditions, comment le film en question aurait pu être distribué dans les salles. Non content, en effet, de critiquer la police, il critique la justice. Ce qu'il montre, en réalité, c'est que les juges sont soumis aux mêmes règles exactement que les policiers: ils font ce qu'on leur dit de faire. On l'a évidemment toujours su, mais le mythe de la justice indépendante en prend quand même un coup. D'où le titre du film: Totalitarisme helvétique. L'absence de toute protection contre l'arbitraire des autorités entre en effet dans la définition même du totalitarisme.

4/11/2024

Se tiennent tranquilles

Je vois peut-être trouble, dit l'Ecolière: mais il me semble qu'ils s'emmêlent un peu les pinceaux. D'un côté ils condamnent à de la prison ferme un écrivain accusé d'"homophobie", et le même jour ou presque ils licencient un enseignant en raison de son "orientation sexuelle". On ne pouvait rien lui reprocher, c'était un excellent enseignant, sauf que les ... locaux l'avaient dans leur collimateur. Les autorités l'ont donc remercié. Je précise bien au passage: pas d'amalgame. La raison du plus fort est toujours la meilleure, dit le Double. Cela vaut pour toutes les situations, y compris et même surtout celles que tu décris. Pour le reste, il faut bien voir ce qui est important. L'important, ce n'est pas que tu sois ceci ou cela. Tu peux être ce que tu veux, ils n'en ont rien à faire. Mais ils aiment faire des exemples. Prends cet écrivain. Ce qui est important, ce n'est pas qu'il soit ce qu'on prétend qu'il est (ou le contraire), mais qu'il en prenne pour un moment. Les gens voient ça, ensuite ils la bouclent (sur ce sujet-là mais aussi sur d'autres) et se tiennent tranquilles. Tout cela s'inscrit dans un contexte général de dictature de plus en plus décomplexée: violences policières, justice sur commande, censure, espionnage intérieur, implication croissante de l'Etat dans des activités criminelles, etc. Tout le monde sait qu'il n'y a plus aujourd'hui d'Etat de droit.