C'est vrai, dit l'Avocate. Il pourrait très bien se faire, un beau matin, que nous parviennent ces mots ailés: "Chers concitoyennes, chers concitoyens, vos avoirs, au cours de la nuit, ont été amputés de 50, 60, voire 80 %. Cette décision, soyez-en certains, n'a pas été facile à prendre, mais nous l'avons prise pour assurer le maintien indispensable de nos super-salaires, prébendes, retraites dorées, indemnités de fonction, rentes de situation: des nôtres propres, mais aussi de ceux des bureaucrates dont, jusqu'ici au moins, l'impôt assurait l'auto-épanouissement harmonieux (maintenant, il est vrai, cela ne suffit plus). Il nous fallait également, comme vous le savez, régler l'arriéré de solde de nos valeureux mercenaires (que d'autres, assurément malintentionnés, ont surnommés nos "petits chéris"): on pourrait craindre autrement qu'ils ne se révoltent. Merci pour votre compréhension, et excellente journée à tous." C'est tout à fait envisageable. Que faire, dit le Collégien? D'abord, ne pas avoir de comptes, dit l'Avocate. Comme ça tu es sûr qu'ils ne seront pas amputés. Je pense ici surtout aux comptes déclarés. Les autres, cela dépend. Rien, a priori, ne t'empêcherait d'avoir un compte non déclaré. C'est tout à fait possible. Mais il faudrait éviter alors de le mettre dans un paradis fiscal: car de tels paradis, aujourd'hui, n'existent plus (au moins pour des gens comme toi et moi: pour certaines multinationales c'est différent). Où donc, dans ces conditions, dit le Collégien? Tu serais surpris d'apprendre ce que, parfois, les gens cachent dans leur jardin, dit l'Avocate.
4/13/2013
4/12/2013
Pas deux
Les gens n'en ont peut-être pas exactement conscience, mais l'Europe est sans doute un des endroits au monde où la propriété privée est la plus exposée, dit le Double. Relativisons, dit le Sceptique. On peut prendre l'argent des gens une fois, mais pas deux. Une fois que l'argent est pris, il est pris. On ne peut pas répéter l'opération.
4/11/2013
Ballon d'essai
Comme toujours, il faut resituer les choses dans leur contexte, dit le Colonel. Vous avez vu ce qui s'est passé récemment à Chypre. Les dirigeants, la main sur le coeur, ont juré que jamais, au grand jamais, ils ne recommenceraient. On a au contraire toutes les raisons de penser qu'ils recommenceront très vite, qui plus est à une beaucoup plus grande échelle. Car les caisses sont vides, ils ont désespérément besoin d'argent. Les gens croient que les dirigeants ne s'intéressent qu'aux comptes non déclarés, ceux enfouis dans des paradis fiscaux. Ils s'y intéressent, bien sûr, ils souhaiteraient même ardemment mettre la main dessus, mais ils s'intéressent aussi aux autres: aux comptes légaux, ceux régulièrement déclarés. La question, en fait, qui se pose n'est pas celle des comptes non déclarés: c'est celle de tous les comptes quels qu'ils soient, aussi bien déclarés que non déclarés. De ce point de vue, Chypre a été un ballon d'essai. On va voir maintenant la suite.
4/10/2013
Renouvellement
On se demandait il y a quelques années ce qui supplanterait un jour la pédophilie en tant que figure du mal radical, dit l'Ethnologue*. Nous avons maintenant la réponse: la fraude fiscale. Ce soir même, sur France Inter, j'en ai entendu un (et même deux, je crois) réclamer la cour d'assises pour les évadés du fisc. La cour d'assises! Avec à la clé, bien sûr, la réclusion criminelle à perpétuité. Vous allez voir, dit le Cuisinier: le Guignol ne pourra s'empêcher de répéter ce qu'il déclarait déjà il y a cinq ans. Vous vous souvenez, n'est-ce pas: qu'il est difficile de savoir par où exactement passe la limite entre mobilisation citoyenne et chasse à l'homme**. C'est assez juste, d'ailleurs: on ne sait pas exactement par où elle passe. A l'époque, cela lui avait valu une promotion.
* Cf. "Analogue", 25 novembre 2008; "Les deux mamelles", 19 novembre 2009.
** "Protesté", 27 mars 2008.
* Cf. "Analogue", 25 novembre 2008; "Les deux mamelles", 19 novembre 2009.
** "Protesté", 27 mars 2008.
4/06/2013
Eux-mêmes
Quelque part, je peux le comprendre, dit l'Ethnologue*. Quand on sait comment est utilisé aujourd'hui l'argent public. A quoi exactement il sert. Qui en vit, etc. En plus, il était ministre du budget. Rien, donc, ne lui échappait. Il avait une vue d'ensemble du problème. Soit, dit le Logicien. Mais on ne saurait à la fois faire la chasse aux fraudeurs et frauder soi-même. Ce n'est pas logique. Cela me paraît au contraire complètement logique, dit l'Ethnologue. Il ne faut pas prendre les gens pour des idiots. Il a menti à la représentation nationale, dit la Poire. C'est impardonnable. Oui, je sais, dit l'Ethnologue, vous aimez les grands mots. La représentation nationale, dites-vous: que représentent-ils, en fait, ces gens? Posez-vous un peu la question. "Impardonnable": comme si eux-mêmes ne mentaient jamais à personne, y compris et même surtout en tant que représentants de ceci ou de cela. Juste retour des choses. Vous dites, dit la Poire? Ce que je viens de vous dire, dit l'Ethnologue.
* L'opinion effondrée apprend que le ministre du budget fraudait le fisc.
* L'opinion effondrée apprend que le ministre du budget fraudait le fisc.