9/30/2018

Passer le temps

Autant, quand on aborde ce genre de problèmes, ne pas trop s'éloigner de la réalité, dit l'Ecolière. Celui-là, par exemple. Il dit vouloir entrer dans des crèches pour y tuer "des bébés ...". Des bébés ..., mais aussi leurs parents: les ... en général, en fait. Tous les ... "Pendez les ...", dit-il. Il veut aussi les "écarteler": les écarteler "pour passer le temps". "Que ça pue la mort, que ça pisse le sang"*. On voyait venir ça depuis un bout de temps déjà. C'était dans l'air. Sauf que, maintenant, c'est dit ouvertement et publiquement. On franchit un pallier. C'est de la poésie, dit la Poire. Les créateurs ont leurs propres façons à eux de s'exprimer. Il ne faut pas tout prendre au pied de la lettre. Et si l'on inversait les rôles, dit le Collégien? Je dis ça comme ça. Moi aussi, tenez, je tiens à me montrer créatif. Il y a quand même un problème, dit l'Ecolière. Lorsque ces ... font quelque chose, il est rare qu'ils le fassent sans, au préalable, s'être assurés du feu vert des dirigeants. Qui paye commande. Tu veux dire que ce n'est pas possible, dit l'Avocate? C'est ce que tu penses? Tu connais bien mal les dirigeants. Bref, les gens sont maintenant prévenus, dit le Collégien. S'il leur arrive un jour d'être écartelés vivants, ils ne pourront pas dire qu'ils n'étaient pas au courant. Rassure-toi, dit l'Avocate. Ils le diront quand même. A quand le passage à l'acte, dit l'Ecolière? D'une certaine manière, c'est déjà fait, dit l'Avocate. Passer de la pensée à la parole, c'est en soi déjà un passage à l'acte. Au-delà, regarde autour de toi.

* "Entre la France et ses rappeurs, la fracture fait toujours mal", Le Temps (Lausanne), 28 septembre 2018, p. 4.




9/20/2018

Effleuré

Qu'est-ce que tu penses de cette audition, dit le Nourrisson? Il y a une nouvelle d'Edgar Poe intitulée La lettre volée, dit l'Avocate. C'est un peu pareil ici, mais avec une différence. Dans la nouvelle de Poe, on cherche quelque chose qui est là devant toi, en fait crève les yeux, mais tu as beau chercher tu ne trouves pas, alors qu'en l'occurrence on fait semblant de chercher quelque chose qui est également là devant toi, sauf que cette fois, quand même, tu as trouvé, mais tu ne peux pas le dire, car si tu le disais, ta carrière, alors, se briserait net, elle partirait en petits morceaux. En plus, tu aurais de bonnes raisons de t'inquiéter pour ta santé. Donc voilà. On a surtout cherché à noyer le poisson. A quoi crois-tu que servent ces commissions. Le seul moment où l'on a effleuré la vérité*, juste effleuré, c'est lorsqu'un des membres de la commission, par mégarde peut-être, a interrogé la personne auditionnée sur ses liens éventuels avec des sociétés privées de sécurité. Elle a reconnu en avoir eu quelques-uns: "il y a très longtemps". On peut effectivement penser qu'en 2015, c'était il y a très longtemps. Mais ça s'est arrêté là. C'était l'extrême limite. Au-delà tu pénètres en zone interdite (Restricted area: Do not enter). On aurait pu lui demandé des noms, des détails, pourquoi tel voyage à tel moment (tiens, par exemple, justement, en 2015), etc. Personne, bien évidemment, ne s'y est risqué. Tu sais maintenant ce qu'est un régime d'administration directe (Direct Rule)**.

* Cf. Drone de l'Antipresse, 16 septembre 2018.
** Cf. "En marche" (2), 4 mai 2017.



9/18/2018

Sacrificielle

En plus, il a l'impression, non complètement infondée, reconnaissons-le, de servir de bouc émissaire, dit l'Avocate. Il faudrait ici relire René Girard. Crois-tu par hasard que ce qu'il a fait, les autres ne le font pas également? Evidemment qu'ils le font. Ils font même bien pire, si tu veux savoir. C'est justement, d'ailleurs, parce qu'ils le font que lui-même, également, le fait. Autrement il ne le ferait pas. Tout ce que font ces gens, ils le font parce que les autres le font. On pourrait en dire autant de leurs opinions. Tout ce qu'ils pensent, ils le pensent parce que les autres aussi le pensent. Tu observeras d'ailleurs qu'ils pensent tous la même chose. A côté de ça, il y a les mythes, autrement dit les histoires que les gens se racontent à eux-mêmes (et sur eux-mêmes). Nous, on est blanc comme neige. On n'a jamais rien accepté comme cadeau. On ne sait même pas ce que c'est, en accepter un. Lui, bien sûr, mis à part. Mais c'est l'exception. René Girard parlait d'unanimité sacrificielle. Unanimité, c'est peut-être un grand mot. Les haines mutuelles subsistent. Mais en même temps il y a cette grande fraternité de saintes nitouches. Serrons les rangs. On aime ou on n'aime pas, mais socialement parlant, c'est assez rentable. Aux victimes émissaires consentantes la république bananière reconnaissante. Sauf, semble-t-il, que celui-là ne consent pas. C'est très ennuyeux.



9/16/2018

Huit moins six

A ..., tu peux toucher une rente à vie après huit années seulement passées à l'exécutif, dit l'Avocate. En plus, elle est plutôt confortable: deux ou trois fois le salaire médian. Encore faut-il les avoir faites, ces années-là. Tu vois de qui je parle. C'est un ... comme les autres. Simplement, il a commis une ou deux petites erreurs. Qu'il reconnaît, d'ailleurs. La "justice" enquête à leur sujet. Et donc, comme on pouvait s'y attendre, tout le monde s'indigne (ou feint de s'indigner): ses ex-copains et ... en particulier. Plus, bien sûr, les journalistes (les mêmes, il y a quelques semaines encore, qui multipliaient les courbettes à son endroit). Tous exigent maintenant sa démission. Or lui refuse. Démissionner? Allez vous faire voir. Il faut ici préciser que, dans son cas à lui, la loi ne prévoit pas de procédure de destitution. Elle aurait pu en prévoir une. Non, elle n'a rien prévu. Personne ne peut donc l'obliger à démissionner. De son côté, pourquoi le ferait-il? Il a au contraire de très bonnes raisons de ne pas le faire. Lesquelles? Oh, c'est très simple. Il n'a passé que six ans à l'exécutif. Huit moins six égale deux. S'il veut donc la toucher, sa rente à vie, il lui faut durer deux ans encore. Je ne sais pas s'il réussira à durer deux ans encore. Deux ans, ça me paraît beaucoup. Entre-temps il risque une "condamnation". Mais il pourrait aussi faire recours. Or les recours sont suspensifs. Bref, ce n'est pas a priori impossible. Marrant, non? A sa place je ferais pareil. Les médias parlent de confiance rompue, d'atteinte au bon fonctionnement des "institutions", et patati et patata. J'aime.