Quand on commence un travail, autant le terminer, dit l'Ethnologue. L'ancien chancelier A. H. disait que si les Allemands perdaient un jour la guerre, ce qui au moment où il le disait était déjà fait, ils pouvaient tout aussi bien disparaître en tant que peuple, car, en cette hypothèse, ils ne méritaient pas de survivre. C'est le télégramme 71: "Si la guerre est perdue, que la nation périsse"*. Lui-même, au demeurant, fit beaucoup pour traduire ce qu'il disait dans la réalité. Ce qu'on oublie trop souvent, soit dit en passant. Le poste de chancelier en Allemagne est aujourd'hui occupé par Mme … Personne n'a jamais demandé à Mme … si, à son avis, les Allemands méritaient ou non de survivre en tant que peuple. Peut-être, un jour, le lui demandera-t-on. Pourquoi non. Un procureur spécial, par exemple. En attendant, rien ne nous empêche de faire un premier bilan. Je fais ceci, je décide cela. En règle générale, on est jugé sur ses actes. Exécutrice testamentaire, quel beau métier. D'une certaine manière, elle est même allée au-delà, puisque ce ne sont pas seulement les Allemands en tant que peuple qui sont en train de disparaître, mais bon nombre d'autres peuples avec eux: leurs voisins immédiats, d'une part, mais aussi un peu plus loin (Grèce, Balkans, pays nordiques, etc.). On imagine les sentiments de profonde tristesse que doit en éprouver, en ce qu'on appelle l'Hadès, l'ombre de l'ancien chancelier. Les larmes amères d'A. H.: ce pourrait être le titre d'un film.
* Cité par Paul Virilio, L'Insécurité du territoire, Galilée, 1993, p. 46.