10/13/2023
Asymétrie
Les gens pensent que tout cela est loin, dit le Double: sauf que le proche et le lointain ont aujourd'hui tendance à se téléscoper. Ils vivent aussi dans le mythe selon lequel les autorités les protégeraient contre toute espèce d'ennemi aussi bien interne qu'externe. Tant qu'ils ne se heurteront pas eux-mêmes à la réalité, ils continueront à le croire. D'une manière générale, on part de l'idée selon laquelle l'Etat serait fort, alors que les groupes armés non étatiques qui le combattent seraient faibles. C'était peut-être le cas autrefois, mais cette époque est révolue. L'asymétrie s'est en fait retournée. Il n'y a que très peu d'Etats aujourd'hui en Europe qui disposent encore d'une armée digne de ce nom. Ils sont aussi préparés à faire la guerre que leurs systèmes de soins et de santé l'étaient, il y a trois ans, à se confronter au Covid-19. Vous oubliez la police, dira-t-on. Oui, il y a la police. Elle est peut-être apte à gazer et/ou éborgner des manifestants pacifiques dans la rue, c'est une chose. Quant à faire échec aux groupes armés en question, c'est une autre affaire. C'est ce qui a fini quand même par apparaître. L'insécurité relève, si l'on veut de la guerre, mais d'une guerre qu'il faut alors considérer comme étant à sens unique, autrement dit pas vraiment de la guerre: au moins si l'on admet, avec Clausewitz, que "la guerre ne commence pas avant que l'invasion ait suscité la défense". Car, en l'espèce, la défense est inexistante. Concrètement, n'importe quoi peut arriver à n'importe qui n'importe quand n'importe où. Le problème a été abordé dans un certain nombre de romans d'anticipation (Jean Rollin, Laurent Obertone, Franck Poupart, etc.). Sauf que la fiction est ici rattrapée par la réalité, certains diront même: dépassée.