L'erreur des conquérants, classique, est de céder à l'impatience, dit le Visiteur. Ils veulent tout et tout de suite. Ils vont trop vite, se compliquant ainsi à eux-mêmes la tâche. Car il ne faut jamais brûler les étapes. Ni non plus bien sûr se démasquer prématurément. L'écrasante majorité des Européens, ces dernières années, s'étaient peu ou prou faits à l'idée de leur propre disparition prochaine en tant que culture. Ils s'y étaient résignés. Ils avaient, en ce sens, complètement intériorisé le discours officiel, celui des princes-esclaves européens* et de leurs relais dans l'espace techno-médiatique. Ouf, se disaient lesdits princes-esclaves. Mission accomplie. On peut respirer. Sauf que les récents attentats ont sinon rebattu les cartes, du moins relancé la partie. Tout paraissait simple, ce l'est un peu moins désormais. Les gens sont peut-être indifférents à leur héritage civilisationnel. En revanche, comme tous les êtres vivants, ils sont animés d'un certain instinct de survie: individuel, certes. Mais réel. Ils n'ont pas, par exemple, tellement envie de finir comme le P. Hamel dans son église de Normandie, la gorge tranchée. Pour ne rien dire des clients du Bataclan, en novembre dernier, retrouvés morts avec les testicules dans la bouche. C'est nouveau comme prise de conscience. On ne sait au juste à quoi elle conduira (si elle conduit à quelque chose). Mais le temps d'adaptation à l'ordre nouveau risque de s'en trouver singulièrement allongé.
*Voir "Quelque part", 2 juillet 2013; "Risques", 5 septembre 2015.