12/20/2015

Evolution

Les dirigeants ne combattent évidemment pas le terrorisme, dit le Colonel. Ils en vivent. Ce qu'il est intéressant plutôt de relever, c'est l'évolution du discours officiel à ce sujet. Alors qu'autrefois les dirigeants disaient: vous allez voir ce que vous allez voir, nous allons éradiquer le terrorisme, leur discours, aujourd'hui, s'est infléchi. Le terrorisme, disent-ils, on aimerait bien pouvoir l'éradiquer: vraiment, sincèrement. Mais la réalité est que malgré tous nos efforts, nous n'y parviendrons jamais: nous ne parviendrons jamais à éradiquer le terrorisme. Il ne vous reste donc d'autre choix que d'apprendre à vivre avec: avec le terrorisme. Vous avez déjà appris à vivre avec la drogue, la criminalité, les "petits chéris", les zones de non droit, le chômage de masse, le stress au travail, etc. Vous apprendrez donc aussi à vivre avec le terrorisme. C'est juste un petit plus. Une petite sauce pour agrémenter le reste. En langage savant, cela s'appelle la résilience. Le mot appartient originellement au vocabulaire de la psychologie, mais les politologues s'en sont récemment emparés, et ce qui précède nous aide à comprendre pourquoi. Ecoutons l'un d'eux: "La résilience ne peut empêcher qu'un événement se produise. Elle peut en revanche lui retirer son potentiel perturbateur"*. Le discours officiel, aujourd'hui, c'est ça. La sécurité, aujourd'hui, n'existe plus, à la place nous avons la résilience: la résilience, qui nous permet de supporter l'insécurité.

* "Combattre la peur comme agent ennemi, Les apports de la résilience" (Entretien avec Chris Zebrowski), DSI, Décembre 2015, p. 61.