6/24/2023

Angle mort

A ton avis, c'en est un, dit l'Ecolière? On a plusieurs fois déjà abordé le problème, dit l'Ethnologue. Tu n'accèdes pas à ce genre de poste sans avoir passé un certain nombre de tests. Il y a quelques exceptions, mais elles se comptent sur les doigts d'une main. Sauf que ce n'est pas écrit sur leur visage. Prenons ces camps pour Japonais ou Américano-japonais. Très peu de gens sont au courant de ces choses. En soi déjà c'est intéressant. En plus, comme tu le vois, il est sans état d'âme. Pour lui, la déportation est un instrument de pouvoir parmi d'autres. Certains naissent comme ça, d'autres, en revanche, ont besoin d'un petit accompagnement. Le problème doit donc être pris à l'envers: qu'est-ce qui pourrait te faire penser que ce n'en est pas un? On ne parle que rarement de ces choses, dit l'Ecolière. Même en privé. Tiens donc, dit l'Ethnologue. S'il n'y avait que les médias officiels, je comprendrais, dit l'Ecolière. Mais il n'y a pas que les médias officiels. Certains quand même en parlent, dit l'Ethnologue: le Carré, par exemple, en plusieurs de ses romans. Ou encore Polanski (The Ghost Writer). Mais ce que tu dis est vrai. C'est l'angle mort de la politique européenne. On parle de tout sauf de ça. C'est comme si cela n'existait pas. C'est d'ailleurs peut-être le cas: cela n'existe pas. Ce que raconte Polanski dans son film n'est que pure fiction. Rien, en fait, n'existe. Les prisons secrètes de la CIA elles aussi relèvent de la fiction. Et bien sûr le complexe militaro-industriel américain. Arrêtons donc de nous fatiguer l'esprit avec ces choses qui n'existent pas et qui surtout n'éclairent rien, n'expliquent rien.