4/30/2012

Autre issue

Une autre issue est-elle pensable, dit l'Etudiante? Pensable, évidemment oui, dit le Colonel: puisque tout le monde y pense. Je veux dire, entre-t-elle dans le champ du possible, dit l'Etudiante? C'est une autre question, dit le Colonel. Tu me demandais si elle était pensable: je t'ai répondu. Entre-t-elle dans le champ du possible? On quitte ici le ciel des idées. Ce qui est pensable n'est pas nécessairement en soi possible. Ni l'inverse non plus, soit dit en passant (c'est presque plus important encore). Je n'ai pas de réponse à ta question. Qui, hormis la divinité, sait ce qui est ou non possible, je veux dire: le sait à l'avance? La mesure du possible, en fait, c'est la réalité. Une chose n'apparaît comme possible qu'après qu'elle se soit réalisée: après seulement.

4/01/2012

Divisés

Tout ce que je vois m'attriste fort, dit l'Anachorète. L'eût-on, autrefois, seulement imaginé. Mais je parle pour moi. Eux-mêmes n'ont pas l'air de trop s'en faire. "Be happy", pour reprendre le titre d'un film récent. "Happy", c'est peut-être aller trop loin. Apathiques, plutôt. Détachés. On dirait des somnambules, ils errent au bord du vide. Allez, on les pousse? Ils se frôlent sans se voir, vaquent mécaniquement à leurs occupations. On est en-deçà même de la résignation, car quand on se résigne, au moins sait-on à quoi l'on se résigne. Eux, de toute évidence, non. Ils s'adaptent, suivent le mouvement. Les psychotropes les y aident. En permanence, ils papotent sur leur portable, racontent leur vie. Ou alors s'attrapent avec leur conjoint: comme c'est intéressant. S'indignent aussi, bien sûr. Bref, je laisse les choses se faire. "Compté, pesé, divisé", comme dit l'Ecriture. Ils seront divisés, autrement dit, littéralement, coupés en petits morceaux. A l'aube, on ramassera les restes. Soit, dit le Cuisinier. Mais il faut être patient. Ce n'est pas demain la veille. Entre le début de la fin, la phase actuelle, et la phase réellement finale, la fin de la fin, il peut s'écouler encore un bout de temps.